Dix victimes d’inceste témoignent de leur long chemin de (re) construction. Pour toutes, la libération de la parole a joué un rôle essentiel.
Sandrine, 49 ans
Le jour de ses 6 ans, un monsieur est venu à l’anniversaire de Sandrine (1). « Mon père était mort deux ans plus tôt. J’ai immédiatement adopté mon beau-père. » Face à une mère dure et égoïste, cet homme doux et rigolo devient son allié. « Sa place n’était pas bien définie. Ma mère ne l’a jamais laissé prendre la place du père. Ce n’était que son compagnon. Et pour moi, un grand copain, un grand frère. »
D’autres limites sont mal posées. La salle de bains est un moulin. Les bains sont pris en commun avec sa mère ou avec son beau-père. « Avec le recul, j’ai compris qu’il n’y avait strictement rien de normal. » Elle a 11 ans le jour où son beau-père la touche pour la première fois dans la baignoire.
Les abus durent jusqu’à ses 16 ans, et se déplacent dans la chambre parentale. Un rituel silencieux s’installe. « Si je ne venais pas, il venait me chercher, et moi je suivais. C’était très ambigu. J’avais l’impression d’y aller volontairement. J’avais besoin d’affection. C’est ce qui m’a piégée. »
Sa mère se rend-elle compte de la situation ? « On avait un parquet qui craquait énormément. Comment ne pouvait-elle pas entendre du mouvement quand elle regardait la télé ? » Jamais pourtant Sandrine ne se sentira en mesure de lui parler. Sa mère la rabaisse si continuellement qu’elle sait d’avance qu’elle ne la croira pas. « Personne ne pouvait savoir.
Extrait d'un article paru sur https: //www.la-croix.com/France/Inceste-parler-reconstruire-2021-03-19-1201146566
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